• LE COLNAGO D'EDDY MERCKX POUR LE RECORD DU MONDE DE L'HEURE DE 1972

    S'intéresser au Colnago d'Eddy Merckx c'est d'abord se confronter à l'histoire du cyclisme mondial et se confronter, sans aucun doute, à ce qui s'est fait de mieux.

    A priori, tout fait rêver dans cette histoire : des grands noms, des belles machines, des records. Et c'est sans compter sur la multitude d'intrigues qui entourent ce vélo.

    Car, en effet, ce sont surtout des énigmes qu'il va falloir résoudre. Combien de vélos ont été préparés pour cette épreuve ? Où sont-ils aujourd'hui ? Lequel a réellement été utilisé pour le record ? Qui a produit les pièces spécialement usinées pour ces montages ?

    Tellement d'éléments contradictoires ont été avancés et écrits à ce sujet que personne – Merckx et Colnago en tête – ne semble véritablement savoir quelle est la vérité. Mais tentons, si vous le voulez bien, de mettre modestement un peu d'ordre dans tout cela.

    Les bonhommes

    Eddy Merckx : qui c'est celui-là ?

    Eddy Merckx, de son vrai nom Edouard Louis Jospeh Merckx, est un ancien coureur cycliste belge, professionnel de 1965 à 1978, et qui peut se vanter d'avoir gagné 625 courses dans sa carrière, et notamment :

    • 11 grands tours (5 Tours de France, 5 Giro, 1 Vuelta), dont 65 étapes remportées ;
    • 3 championnats du monde ;
    • 28 Classiques (Milan-San-Remo, Paris-Roubaix, Tour des Flandres, etc.) ;
    • 98 victoires sur piste (Six jours, courses à l'américaine, Omnium).

    Un coup d'oeil à son palmarès détaillé ici et vous comprendrez vite que sa légende n'est pas usurpée. Il est (avec Fausto Coppi) la crème de la crème de la crème.

    Je ne m'étendrai pas sur la biographie de Merckx, pour cela, je vous renvoie aux excellents ouvrages de Théo Mathy ou Marc Jeuniau, mais un mot tout de même sur son « style ».
    Merckx a rapidement reçu deux surnoms – le cannibale ou l'ogre – qui illustrent tant son appétit insatiable de victoires que ses capacités sportives et mentales exceptionnelles.
    Celui qui définit le mieux Eddy Merckx reste encore Philippe Miserez, médecin du Tour dans les années 70 lorsqu'il déclare : « ce n'est pas Merckx qui a la fréquence cardiaque la plus lente, la meilleure capacité pulmonaire, et ce n'est pas lui non plus qui a la meilleure VO2max. Il est simplement celui qui sait aller le plus loin dans la douleur ».
    Merckx sait tout faire sur un vélo, il est excellent dans les classiques, dans la montage, sur la piste, dans les courses à étapes, et ce qu'il fait le mieux c'est attaquer.

    Et puis, comme pour tout héros, il lui a fallu des adversaires, et on peut dire qu'il n'en a pas manqué : Van Looy, Maertens, de Vlaeminck, Poulidor, Gimondi, Ocana et... Ole Ritter (on y reviendra). Mais à chaque fois, Merckx a été le plus fort.

    Ce bonhomme a dominé le cyclisme pendant une vingtaine d'années. Tout simplement.

    Ça c'est pour la légende.

    Car si sa domination semble évidente aujourd'hui, sa conquête du peloton ne doit pas être imputée qu'à ses seuls talents de cycliste. Elle s'est souvent faite dans la douleur et parfois avec le concours de la chance (le Tour 71 par exemple).

    Dans la pratique, cette domination a été le fruit d'un gros travail en coulisse : des équipiers, des mécanos, des cadreurs, des sponsors entièrement dévoués à la réussite du champion, notamment à partir de 1968 et son arrivée dans l'équipe Faema.

    Si vous avez vu The Last Dance, le documentaire sur Michael Jordan, vous serrez frappés par les similitudes de comportements entre ces deux athlètes hors-normes : perfectionnisme maladif envers soi-même, dirigisme envers les autres et une capacité époustouflante à bâtir un empire à leur service (co-équipiers, encadrement, innovation technique, etc.).
    Des champions qui ont compris qu'être le plus fort individuellement ne suffit pas à rester sur le toit du monde.

    J'arrête là la comparaison avec his airness pour revenir à Eddy Merckx et à sa domination sur le peloton pour évoquer les affaires de dopages qui ternissent le tableau, et qu'on se gardera de commenter, tant cette question est délicate à juger et tant ces pratiques sont liées à ce sport. Merckx ne s'est jamais vraiment défendu de ces accusations, si ce n'est avec une formule restée fameuse : « le dopage ne transforme pas un âne en cheval de course ».

    Par ailleurs, on sait qu'il était perfectionniste et très attentif au matériel et aux réglages, à tel point que n'importe qui ne pouvait pas cadrer ses montures.

    Voici la liste des cadreurs autorisés du cannibale. Attention, il ne faut pas confondre ces cadres avec ceux de la marque Eddy Merckx, fondée en 1980 après la retraite du champion, et qui a équipé plusieurs équipes pro dont les fameuses GAN, Telekom ou Motorola.
    http://www.classicrendezvous.com/Benelux­/Merckx/bicycle_makers.htm

    • Il semble que Charles Terryn n'ait jamais réalisé de cadre. Marcel Vandenneste était le cadreur de Merckx à cette époque. En revanche, Terryn réalisait les montages.
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